Trompe-l'oeil médiatique

Le 24 juin dernier, le chroniqueur techno de Radio-Canada, Bruno Guglielminetti, caressait ses lecteurs québécois dans le sens du « poële » en leur signalant l’entrée du mot « blog » dans l’édition 2006 du dictionnaire Larousse. Évidemment, la levée de boucliers linguistiques ne s’est pas faite attendre et plusieurs commentateurs se sont dit offusqués que les éditeurs français aient choisi l’emprunt direct à l’anglais plutôt que le néologisme « blogue » préféré par l’Office de la langue française du Québec.

L'oeil était dans le blogue et regardait Caïn :)Le 24 juin dernier, le chroniqueur techno de Radio-Canada, Bruno Guglielminetti, caressait ses lecteurs dans le « sens du poële » en leur signalant l’entrée du mot « blog » dans l’édition 2006 du dictionnaire Larousse. Évidemment, la levée de boucliers linguistiques ne s’est pas faite attendre et plusieurs commentateurs se sont dit offusqués que les éditeurs français aient choisi l’emprunt direct à l’anglais plutôt que le néologisme « blogue » préféré par l’Office de la langue française du Québec.

Une rapide recherche dans Google permet pourtant de retrouver la trace des dépêches d’agence originales, elles-mêmes n’étant probablement que des concentrés de communiqués de presse plus détaillés. On y découvre plusieurs québécismes dans cette nouvelle cuvée lexicale — « calotte », « grignotine » ou « jambette » — ainsi que des belgicismes, helvétismes et autres italianismes, d’ailleurs. Bref, j’en déduis que notre langue s’abreuve à plus d’une culture, tout en respectant le génie propre à chacune.

Quant à l’orthographe controversée du mot blog[ue], l’usage majoritaire en assurera probablement la pérennité. Là encore, Google recense près de 4 millions d’occurences du mot « blog » sur le Web francophone, contre moins de 340 000 pour sa version québécisée. Cette dernière ne risque guère d’entrer dans le dictionnaire qu’à titre de variante québécoise, ce qui semble correspondre assez bien à la réalité. Et pourquoi pas, d’ailleurs?

Quoi qu’il en soit, cette anecdote sans importance prouve une fois de plus que le public ne sort pas grandi des pratiques journalistiques dominantes qui consistent à triturer les dépêches d’agences pour leur faire dire n’importe quoi. Sur le Web, on a pourtant la possibilité d’inclure dans ses textes des liens vers les sources au profit des lecteurs intéressés à en savoir plus. Rares sont les journalistes en ligne qui offrent cette valeur ajoutée à leurs lecteurs. C’est d’autant plus dommage qu’ils reporteraient ainsi sur eux la responsabilité de s’informer convenablement avant de porter un jugement.

4 réflexions sur « Trompe-l'oeil médiatique »

  1. Il n’en demeure pas moins que les Français semblent préférer les emprunts à l’anglais aux néologismes. Pour je ne sais quelle raison !!!

  2. Probablement parce qu’ils ont moins peur de perdre leur langue que les québécois, je crois. En tant que nation, la France se perçoit traditionnellement, à tort ou à raison, comme une puissance « rayonnante », et non comme un petit peuple assiégé. Par ailleurs, les « bleus-blancs-gros-rouge » de Jean-Marie Le Pen se sentent maintenant envahis par les Maghrebins (l’histoire est comique) qu’ils ont si longtemps envahi eux-mêmes. Dans ce contexte, la langue des « White Anglo-Saxon Protestants » peut être perçue comme un rempart contre les invasions berbères.

    Pour revenir aux Québécois, ce serait intéressant de comparer leur réaction aux anglicismes avec celle des Belges et des Helvètes. Eux aussi sont minoritaires en leurs pays, mais leurs majorités respectives ne sont pas anglophones. Ils ont la chance (?) d’être en contact direct avec le territoire français et ses vigoureux médias, au sein de la mosaïque linguistique européenne. Ils se sentent forcément moins isolés…

  3. Ce que je vois surtout, c’est que le Larousse a de facto régionalisé le mot ‘blogue’ : c’est donc un canadianisme (non répertorié, évidemment). L’histoire du ‘courriel’ qui se répète?

  4. Ah ben c’est cocasse, en effet. Cela prouve au moins qu’il ne s’agit pas là d’une affaire de dogme, mais d’une réalité sociale en mouvement, tributaire du point de vue de l’observateur. Dans quatre ou cinq ans, les bonzes de l’Académie française trancheront probablement la question au fil à couper le beurre 🙂

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