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Cette chronique a été publiée le 8 mars 1999 dans Multimédium, le cyberquotidien des TIC effacé du cyberespace par Québecor Media en mai 2002.


En cette Journée de la Femme,
célébrons l’avènement de la parité virtuelle!

 

Christian Aubry en 1999Le réseau Internet n’est plus ce qu’il était. De mon temps – il y a de cela trois ou quatre ans – ce non-lieu était presqu’exclusivement réservé aux hommes. Les rares femmes que l’on y rencontrait étaient soit de voluptueuses créatures jetées en pâture à la concupiscence masculine, soit des féministes notoires ferraillant en mode texte dans les niouze-groupes du gauchisme intello.

Les temps ont changé. À en croire les prédictions de Frank Gens, vice-président senior chez IDC, les femmes représentaient 48 % de la population internaute fin 1998, contre 43 % au début de la même année. Avant l’an 2000, il y aura donc plus d’internénettes que d’intermachos dans notre ci-bas monde. En ce 8 mars 1999, célébrons donc l’avènement de la parité virtuelle – à défaut de l’atteindre, hélas! dans les vrais cercles du pouvoir…

Car les pros du big online business applaudissent à cette féminisation virtuelle pour des raisons évidentes. Dans les années 60, rappelez-vous, les propriétaires de tavernes souhaitaient déjà la « Bienvenue aux dames »…

Pour les gourous du cybermarketing, en effet, la femme idéale est avant tout une consommatrice prescrivant les trois quarts des achats familiaux. Grâce à son arrivée en force sur le réseau, le cybercommerce devrait donc sortir de l’enfance pour devenir une affaire aussi sérieuse que lucrative.

Cependant, le Web est encore d’essence profondément masculine, conçu par une majorité d’hommes pour une majorité d’hommes. Ces grands enfants passent nettement plus de temps en ligne que leurs compagnes, lesquelles ont sans doute d’autres centres d’intérêts – pour ne pas dire d’autres tapis à fouetter. Il ne faudra donc pas s’étonner de voir les analystes s’attarder, cette année, sur le comportement des femmes en ligne. Qu’aiment-elles? Que veulent-elles? Dans quel état gèrent-elles? Où se cache leur point W?

Dans certain cas, Mesdames z’et Messieurs, il faudra songer à étoffer quelque peu vos sites Web. Ceux à orientation typiquement masculine (technique, sports, etc.) sont assez bien garnis, en effet, mais ceux d’essence plus féminine (mode, décoration, magazines, etc.) sonnent bien souvent trop creux. « Je ne trouve jamais ce que je cherche sur Internet! », se plaignait récemment ma dulcinée, déçue de lécher des vitrines anémiques et d’écumer des cyberboutiques aux allures soviétiques.

Au Québec, les femmes représentaient l’an dernier 42 % des internautes, contre 34 % seulement en France (voir la dernière étude Médiamétrie). Mais les choses devraient bouger cette année dans l’Hexagone, d’autant que le fournisseur d’accès Internet World Online a décidé de faire sa part en « offrant l’Internet aux Femmes »: six mois d’accès gratuits pour les 5 000 premières chanceuses, ça ne se refuse pas et c’est tout un symbole!

Ceci dit, espérons que la gens féminine gardera la tête froide et ne tombera pas dans le cyberpanneau publicitaire. Internet facilite la vie et procure bien des plaisirs, mais ce n’est pas une raison pour verser dans la potiche virtuelle. Alors, Mesdames, n’ayez plus peur des souris. Investissez le Web, façonnez-le à votre image!

Ami calmant,

Christian Aubry

» Reproduction autorisée à certaines conditions :
Take One!

» Les Internénettes débattent de la « vraie parité ».
» Internet au féminin selon une Webgrrl, dans TCP Mag.