Reprenant un article de La Presse, une dépêche de Radio-Canada m’apprenait ce midi qu’André Caillé, l’ex-P.-d.g. d’Hydro Québec, allait toucher une retraite de 300 000 $ par année. « Ce dernier a accepté de présider, gratuitement (sic!), le conseil d’administration d’Hydro.« , était-il précisé. À ce tarif-là, moi, je veux bien nettoyer gratuitement les toilettes de l’Assemblée nationale!
Soyons sérieux. André Caillé est remercié après neuf années passées à la tête du fleuron de Québec inc. pendant lesquelles il a empoché une rémunération de l’ordre de 460 000 $ par an — sans parler des autos, appartements de fonction, vacances de rêve, gadgets hors de prix, dépenses de représentation et autres menus à-côtés faisant parti du quotidien des grands capitaines d’industrie. Mettons qu’il s’est assis sur un minimum de quatre millions en dix ans. Il serait donc normal que que ce talentueux serviteur de l’État, amoindri par tant de sacrifices, touche maintenant une petite fortune à ne rien faire. Bien entendu, le pactole récurrent qui servira à accroître sa fortune personnelle sera prélevé chaque année à même nos impôts, et ce aussi longtemps qu’il vivra.
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Le Gouvernement du Québéc a de la difficulté à boucler son budget, parait-il. Il manque d’inspiration et il faudrait l’aider. Par exemple, l’Institut de la statistique du Québec(*) pourrait compiler chaque année les sommes astronomiques versées à titre de rente aux anciens commis de l’État et de ses satellites. Si l’Institut n’ose pas, les médias pourraient le faire en vertu de la Loi de l’accès à l’information. Il doit y avoir là assez de gras pour qu’un gouvernement responsable puisse se permettre d’en retrancher quelques centaines de millions afin de les mettre ailleurs, là où ils seraient dépensés à des fins plus utiles à la cause perdue des infirmières, éducatrices, enseignants, artistes, chercheurs et autres étudiants.
Car enfin, si la grande majorité des citoyens trime dur pour garnir tant bien que mal un fond de pension généralement insuffisant, quelle justification y a-t-il à ce que de haut fonctionnaires grassement rémunérés pendant six ou dix ans d’exercice touchent, une fois remerciés, des rentes faramineuses à même les deniers de l’État? On ne parle pas ici de sommes raisonnables, soumises à un plafond décent, éventuellement bonifiées par les revenus d’un RÉER obéissant à la logique fiscale qui s’applique à toute la société. Il s’agit plutôt de clauses discrétionnaires, identiques à celles du secteur privé mais totalement grotesques dans un système à financement universel et obligatoire comme le service de l’État.
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* En parlant de l’ISQ, une autre dépêche m’apprenait hier soir que le revenu personnel moyen au Québec s’établissait l’an dernier à 28 600 $ par an, soit 34 600 $ pour les hommes et 22 600 $ pour les femmes. Je me demande ce que les femmes de Gaspésie et des Îles-de-la-Madeleine, dont le revenu annuel moyen s’élève à 15 739 $, pensent des «retraites» en or massif accordées à leurs élites, année après année, à même leurs maigres impôts.
▶ Plus de détails dans les tableaux statistiques de l’ISQ.
Le même phénomène prévaut dans les universités où les recteurs continuent d’être payés plein salaire à la fin de leur mandat. De mémoire, à l’Université Laval, c’est 100 % du salaire la première année suivant le départ, 90 % la deuxième, 80 % la troisième, 70 % la quatrième, 60 % la cinquième et là, ça plafonne !